4 août 2020

Blog du Projet de collaboration sur les données sanitaires.

@WHO/Rada Akbar

Derrière chaque chiffre il y a une personne et investir pour des populations en bonne santé signifie aussi accorder de la valeur aux données et aux systèmes d’information sanitaire et investir en leur faveur.

Dans ce blog, le Projet de collaboration sur les données sanitaires, une initiative apparentée à la CSU2030, propose trois éléments précis pour des systèmes de santé résilients et réactifs.

La pandémie de COVID-19 que nous vivons a renforcé l’attention accordée aux données et aux systèmes d’information sanitaire. Le Dr Tedros Adhanom, Directeur général de l’OMS, décrit la couverture santé universelle (CSU) et la sécurité sanitaire comme « les deux faces de la même médaille ». En d’autres termes, il n’y a pas de CSU sans sécurité sanitaire ; il ne peut y avoir ni sécurité sanitaire ni CSU sans de solides données sur les soins de santé.

Les données sont un atout stratégique qui aide à protéger tout le monde. Des données ponctuelles, exactes, complètes et sûres sont les fondations qui permettent de prendre des décisions à base factuelle pour la santé, d’allouer judicieusement les ressources tout en recherchant les communautés laissées de côté et en les soutenant. Les données comprennent les statistiques, la recherche, les technologies numériques, les enquêtes, les recensements, les enregistrements de l’état civil et les rapports administratifs.

De solides systèmes d’information sanitaire permettent un parcours sûr et transparent des données depuis leur recueil, leur stockage et leur analyse jusqu’à leur diffusion et leur utilisation.

Avec un vaste éventail de sources de données dans de solides systèmes d’information sanitaire, il est possible de mesurer les progrès, de suivre les engagements et de promouvoir la redevabilité pour satisfaire les besoins de tous. Cela inclut les communautés vulnérables laissées de côté, dans les situations d’urgence ou de non-urgence, qui connaissent la plus lourde charge de maladies ayant pour origine les déterminants sociaux.

Se fondant sur le document de réflexion de la CSU2030 sur les situations d’urgence et la CSU, le Projet de collaboration sur les données sanitaires propose trois éléments spécifiques pour les données et les systèmes d’information sanitaire indispensables pour compter sur des systèmes de santé plus résilients et réactifs :

  1. une solide gouvernance des données ;
  2. des partenariats communautaires pour s’attaquer aux inégalités ;
  3. augmenter la confiance accordée aux données.

1. Une solide gouvernance des données étaye des systèmes de santé réactifs

Une bonne gouvernance des données et des questions numériques renforce la redevabilité et la réactivité du système d’information sanitaire en garantissant l’inclusion de structures transparentes et de processus bien documents dans le parcours des données, notamment :

  1. des principes et des politiques pour la collecte, l’analyse, l’utilisation et le partage des données ;
  2. des structures qui recueillent, emmagasinent et analysent les données en toute sécurité
  3. des processus et procédures pour une prise de décision et une mise en œuvre à base factuelle.

On pense souvent que la gouvernance des données va de soi dans le cadre d’un système de santé opérationnel. Les urgences sanitaires braquent les projecteurs sur les forces et les faiblesses des systèmes d’information sanitaire ainsi que sur les principes, les politiques, les structures et les procédures sur lesquels ils reposent. Les urgences obligent souvent à réviser les méthodes de gouvernance des données pour veiller à ce que les systèmes d’information sanitaire soient capables de satisfaire les besoins accrus en données, afin qu’en dernier ressort les personnels de santé parviennent à répondre aux crises tout en maintenant les services essentiels. 

Les ripostes à des urgences sanitaires telles que le COVID-19 fonctionnent souvent séparément des politiques et des dispositions de dotation en personnel des systèmes de santé de routine. Ce cloisonnement peut compliquer l’adaptation à long terme des systèmes d’information sanitaire ordinaires.

La riposte internationale à une pandémie exige une collaboration à tous les niveaux. Il doit y avoir une bonne gouvernance des données nationales et mondiales afin de protéger la disponibilité, l’utilité, l’intégrité et la sécurité de l’information. Des données concrètes et transparentes devraient être le résultat direct d’une bonne gouvernance des données. Une gouvernance bien conçue fournit aussi une base pour la redevabilité dans la riposte à l’urgence et les activités de renforcement des systèmes de santé.

Certains aspects de deux initiatives mondiales prometteuses – la nouvelle stratégie du Secrétaire général de l’ONU en matière de données et le projet de collaboration sur la Route vers Berne – pourraient aider à façonner la collaboration intersectorielle et multisectorielle au niveau national pour la gouvernance des données.

2. Des données granulaires à assise communautaire sont requises pour s’attaquer aux inégalités

La réalisation du programme en matière d’équité de la CSU, c’est-à-dire veiller à ne laisser personne de côté, dépend en partie de la disponibilité de données granulaires désagrégées sur les groupes de populations défavorisées.

Elle exige aussi la participation des communautés au recueil, à l’analyse, à l’interprétation et à l’utilisation des données. Pour obtenir des données granulaires, il faut nouer des partenariats étroits avec les communautés qui connaissent la plus forte charge de morbidité : les groupes les plus vulnérables qui vivent dans des environnements fragiles, les populations urbaines pauvres ou rurales éloignées ou encore celles qui sont touchées par la stigmatisation et la discrimination. Les approches de partenariat avec les communautés par le biais de mouvements de la société civile peuvent faciliter la recherche des contacts, la surveillance communautaire, la promotion des messages de santé et la mise au point d’innovations pour surmonter tout obstacle à l’accès aux services de santé, comme la désorganisation des transports.

S’associer aux communautés pour planifier, mettre en œuvre et suivre les services renforce aussi la confiance dans le système de santé, donne un mécanisme pour la redevabilité et accroît les probabilités que les services de santé soient durables et en fin de compte acceptables et adaptés aux besoins des membres de la communauté. C’est encore plus nécessaire pendant les situations d’urgence.

Un exemple venant du Kenya concerne M-Tiba, un « portefeuille santé » qui est aligné sur la politique de CSU nationale. Les données produites par ces plateformes peuvent être utiles pour guider les initiatives et politiques de santé nationales et mondiales.

3. La confiance accordée aux données est un atout trop souvent négligé

Les données sont un atout stratégique, particulièrement précieux dans les époques de crise. Elles sont aussi un produit de base avec une valeur financière, puisqu’elles ont des acheteurs et des vendeurs sur des marchés ouverts. Il faut équilibrer l’adoption de principes de données ouvertes et le partage d’informations au nom des biens communs mondiaux et des ripostes de santé publique à une pandémie avec des approches des données fondées sur l’éthique, le respect de la vie privée et les droits de l’homme. 

Des années sont nécessaires pour instaurer la confiance entre les partenaires internationaux et les gouvernements nationaux et entre les autorités nationales et les communautés, mais quelques secondes suffisent pour la perdre pendant les époques de crise. La confiance accordée aux données, un atout souvent négligé, a plusieurs dimensions :

  • les décideurs et les responsables des budgets ont confiance dans la ponctualité, l’exactitude, la cohérence, la complétude et la qualité des données ;
  • les individus et les communautés font confiance à leurs autorités pour stocker, utiliser et partager des données d’une façon qui garantisse la confidentialité ;
  • les États membres font confiance aux organisations multilatérales (par exemple l’OMS, l’UNICEF, l’ONUSIDA, le FNUAP, la Banque mondiale et d’autres) pour stocker et utiliser leurs données en toute sécurité ;
  • les États membres, les individus et les communautés font confiance aux organisations multilatérales, aux initiatives mondiales de santé et au monde universitaire et de la recherche pour ne pas vendre au plus offrant des données susceptibles de contenir des informations sensibles.

Conclusion

Le COVID-19 nous a forcés à réexaminer l’importance vitale des données, des innovations numériques et de l’utilisation pratique des informations pour traduire les engagements pour la CSU en actions et façonner la nouvelle normalité des systèmes de santé. Les urgences sanitaires peuvent détourner l’attention du recueil durable des données et de l’acquisition de connaissances en faveur des activités de réponse. Pourtant, le COVID-19 représente une occasion d’améliorer les systèmes d’information sanitaire afin que les pays soient mieux préparés à de futures pandémies et qu’il y ait une meilleure intégration entre la riposte aux urgences et les systèmes d’information de routine. 

Les trois éléments suggérés par le Projet de collaboration sur les données sanitaires sont essentiels en vue de renforcer la redevabilité et la coordination et de s’assurer que les systèmes de santé résisteront aux chocs et seront capables de maintenir des services de routine qui répondent aux besoins communautaires, même dans des conditions de pandémie.

Le Projet de collaboration demande à tous ceux qui planifient de solides systèmes de santé pour réaliser les objectifs de la CSU de :

  1. donner la priorité à la gouvernance des données et à une meilleure utilisation des données comme fondement de la CSU ;
  2. nouer des partenariats communautaires pour instaurer un climat de confiance et utiliser des informations mieux désagrégées ;
  3. renforcer la confiance dans les systèmes de données en garantissant la sécurité des données et en utilisant des politiques claires de partage des données et des cadres éthiques.

Auteurs du blog

  • Helen Kiarie, Cheffe de la Division de suivi et d’évaluation, Ministère de la santé, Kenya, et Coprésidente du Projet de collaboration sur les données sanitaires ;
  • Jennifer Requejo, Conseillère principale sur les statistiques et le suivi, Division des données et des analyses, UNICEF, New York, États-Unis d’Amérique, et Coprésidente du Projet de collaboration sur les données sanitaires ;
  • Somnath Chatterji, Directeur par intérim du Département des données et analyses, DDI, OMS Genève, Suisse, et Coprésident du Projet de collaboration sur les données sanitaires ;
  • Ben Dahl, épidémiologiste, Centers for Disease Control, Atlanta, États-Unis d’Amérique, et ancien Coprésident du Projet de collaboration sur les données sanitaires ;
  • Mwenya Kasonde, secrétariat du Projet de collaboration sur les données sanitaires, OMS Genève, Suisse ;
  • Craig Burgess, secrétariat du Projet de collaboration sur les données sanitaires, OMS Genève, Suisse.

Crédit photo : OMS/Rada Akbar

Légende : Le Dr Sabah Noor, âgé de 51 ans, note les informations d’un patient dans un dispensaire mobile (camp de réfugiés de Pul-e-Campany à Kaboul, Afghanistan).

Catégories: Avancer ensemble, Gouvernement, Initiatives apparentées

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