La CSU2030 et la Coalition des partenariats pour la CSU et la...
5 avril 2022
Dr Mohammed Abdulaziz, Maziko Matemba, Dre Herilinda Temba et Dr John Wanyungu
Bien avant que les agents de santé communautaires (ASC) ne soient placés sous le feu des projecteurs par la pandémie de COVID-19, ils étaient au centre du contrôle et de la prévention des maladies en Afrique subsaharienne. Compte tenu de la volonté indéfectible des ASC de sauver des vies et d’améliorer la santé de leurs voisins, c’est contraire à l’intérêt de tous les Africains que ces travailleurs demeurent non rémunérés, non assurés, mal formés et mal équipés. Depuis des mesures nationales et locales qui officialisent les ASC jusqu’à un nouveau service de santé communautaire qui se forme au sein du Centre africain de contrôle et de prévention des maladies (CDC Afrique), nous intervenons résolument pour améliorer la condition des agents de santé communautaires. C’est la seule façon d’aller de l’avant si nous ne voulons pas gaspiller la force la plus puissante dont nous disposons pour parvenir à la couverture santé universelle (CSU).
En 2019, la moitié de la population mondiale n’avait pas accès aux services de santé essentiels, d’après l’Organisation mondiale de la Santé, qui a conclu que la CSU n’était pas possible dans les conditions actuelles. Avec le rayon d’action des agents de santé communautaires et leur capacité à assurer un vaste éventail de services de prévention, de soins et de promotion de la santé, des programmes d’ASC intégrés robustes sont indispensables pour élargir la couverture santé. Et ainsi que les virus Ebola et COVID-19 l’ont montré sans équivoque, la lutte contre les infections ne se déroule pas du haut vers le bas. Les ASC sont donc dans une position idéale pour rapidement détecter, surveiller et juguler les épidémies. En fait, les données ont maintes fois montré que la sécurité sanitaire et la CSU exigent des investissements dans les fondements des systèmes de santé, notamment des ASC et d’autres agents de santé bien formés.
Le CDC Afrique a tiré parti de ce rôle particulier des agents de santé communautaires avec le Partenariat pour accélérer les tests en matière de COVID-19 (PACT), au titre duquel les ASC ont rendu visite à plus de deux millions de ménages dans 27 pays pour retracer les cas contacts et mener d’autres activités préventives. Se fondant sur le succès du PACT et conformément à l’initiative lancée par l’Union africaine pour former et déployer deux millions d’ASC, le CDC Afrique établit un service de santé communautaire et définit une stratégie sanitaire communautaire pour 2022-2026. Si l’on tient compte de la mission du CDC Afrique, à savoir consolider la capacité des institutions de santé publique à détecter, prévenir, contrôler et traiter les risques posés par les maladies, il est plus clair que jamais que les ASC font partie intégrante de ce résultat. Investir dans la santé communautaire est une priorité régionale.
Les lois cimentant le statut des ASC sont une étape capitale. Certains gouvernements de comté au Kenya ont récemment adopté une législation reconnaissant officiellement les ASC et leur accordant une rémunération, tout en les dotant d’un mentorat et d’une supervision. Au Kenya, les lois sur les services de santé communautaires des assemblées de comtés forment une base juridique pour mobiliser des ressources internes pour les systèmes de santé communautaires. Elles inscrivent dans la législation des comtés la prestation efficace de services de santé intégrés, complets et de qualité au niveau local. Dans l’ensemble du Kenya, où les services de santé sont décentralisés et relèvent des autorités des comtés depuis 2013, la plupart des comtés travaillent à des projets de loi sur les services de santé, tout comme les autorités nationales.
Il n’est pas surprenant que les communautés elles-mêmes prennent la tête du mouvement en faveur de ces lois. Elles connaissent l’utilité des ASC. Au Kenya, une coalition portant le nom de CHU4UHC (Unités de santé communautaires pour la couverture santé universelle) est apparue l’an dernier, alors que les organisations locales faisaient campagne pour une participation accrue des agents de santé communautaires à la riposte donnée à la pandémie. Le groupe a élargi son champ d’action pour se centrer sur la prestation de services de santé communautaires et pour plaider en faveur d’une reconnaissance officielle des ASC.
La formation des ASC est au cœur d’une nouvelle stratégie au Malawi, où le Ministère de la santé a lancé un cours d’homologation des ASC d’une durée d’un an qui sera dispensé dans une faculté de médecine. Si le pays soutient depuis longtemps les ASC, à ce jour, la qualité des soins a souffert d’une supervision et d’une formation minimales et d’un manque de plan de carrière clair. En vertu du nouveau programme, les ASC, qui forment plus de la moitié du personnel de santé du Malawi, bénéficieront aussi d’un mentorat et de possibilités de développement professionnel.
Le Malawi comprend que des ASC mieux formés non seulement amélioreront la qualité des soins, mais réduiront aussi les dépenses de santé à long terme.
Les cadres juridiques et les homologations nationales feront beaucoup pour renforcer les programmes des ASC, en particulier parce que les fonds vont là où la volonté politique existe. Pour le moment, ces initiatives sont principalement financées par les donateurs et sont trop souvent liées à un projet ou une maladie. Une partie du travail futur des gouvernements sera de trouver des moyens novateurs de financer durablement le secteur de la santé dans son ensemble et de consolider les fondements des systèmes de santé, y compris les systèmes et réponses sous l’égide des communautés. Avec sa stratégie de plaidoyer, le CDC Afrique souhaite promouvoir des investissements nationaux et externes accrus et coordonnés en faveur des systèmes de santé communautaires.
Nous devons correspondre à la contribution inestimable des ASC avec des investissements pour qu’ils réalisent leur plein potentiel avec un leadership et des ressources.
Lorsqu’on lui a demandé lors d’un récent webinaire quelle était la motivation des bénévoles, Prossie Muyingo, une ASC ougandaise, a déclaré : « vous ne pouvez pas simplement rester assise quand votre bébé se meurt, même si ce n’est pas chez vous. »
Les décideurs doivent rendre justice au dévouement, à la résilience et à la volonté dont font preuve les ASC pour atteindre chaque personne, où qu’elle se trouve, avec des services de santé de qualité, pour le bien de tous. Nous devrions croire Prossie et ses collègues quand ils disent qu’ils nous amèneront jusqu’à la couverture santé universelle et leur donner les outils qui faciliteront leur réussite.
À propos des auteurs
Mohammed Abdulaziz dirige la Division de contrôle et de prévention des maladies, CDC Afrique
Maziko Matemba est ambassadeur de la santé communautaire, Ministère de la santé et de la population, Malawi
Herilinda Temba est responsable technique principale des ASC au sein du partenariat PACT, Division de contrôle et de prévention des maladies, CDC Afrique
John Wanyungu est vice-directeur de la Division des services de santé communautaires au Ministère de la santé du Kenya
Crédit photo: Living Goods
Catégorie: Société civile et communautés